Vous pouvez écouter la retranscription audio de cet article en cliquant ci-dessous
Comment sortir de nos prisons mentales et nous libérer ?
Trois penseurs nous donnent leurs conseils
Êtes-vous prêt à faire des efforts pour trouver la joie et atteindre la liberté intérieure ? Si oui, un entraînement de l'esprit est recommandé comme la méditation. Mais comment procéder ?
Dans A nous la liberté ! (Ed. L'Iconoclaste), Matthieu Ricard le moine bouddhiste, Christophe André le psychiatre et Alexandre Jollien le philosophe nous donnent les clés pour nous évader de nos prisons et nous rapprocher les uns des autres.
Christophe André explique que ce livre a été inspiré par le constat que nous sommes tous dépendants de choses qui nous font souffrir parce que nous y sommes trop attachés. Cela conduit à la question de la liberté ou, plus encore, de la libération. C'est la lutte incessante pour sortir des prisons mentales. Il ne s'agit pas seulement d'éliminer nos préjugés, nos émotions et nos obsessions, mais aussi les influences extérieures comme le matérialisme et le consumérisme. Ce sont autant de facteurs qui peuvent influencer notre développement social.
S'alléger
La sagesse est souvent considérée comme l'accumulation d'intelligence, d'expérience et de réflexion. C'est en partie vrai. Cependant, il y a aussi un travail de libération et d'allègement. Nous nous débarrassons de toutes les idées préconçues et certitudes qui nous rassurent et nous mettent à l'aise, sans avoir à fournir trop d'efforts.
Notre éducation nous façonne, pour le meilleur et pour le pire. Les idées préconçues et les intérêts peuvent entraver notre capacité à entrer en relation avec le monde extérieur. Alexandre Jollien décrit cette libération comme une joie. " C'est comme si nous arrachions les chaînes qui nous retiennent dans l'immobilité, et nous figent dans la souffrance. "
Matthieu Ricard affirme que ce besoin de soulagement est souvent négligé car on n'a pas l'impression d'être dans une prison sombre. Cependant, affirmer que " je suis libre " ne signifie pas que nous ne pouvons pas être esclaves de ruminations mentales ou de conditionnements. Nous pouvons alors tenter de nous débarrasser de ce qui empoisonne durablement notre vie et celle des autres : le ressentiment et la colère, le désir et la jalousie, l'animosité... qui sapent notre joie de vivre et notre bien-être intérieur, et nous amènent à parler et à agir d'une manière qui nuit au lien social ainsi qu'à la qualité des relations humaines.
Comment sortir de l'acrasie
Alexandre Jollien explique que l'acrasie est la différence entre nos idéaux et nos aspirations, et la façon dont nous vivons notre vie. L'un des meilleurs exemples est celui de la perte de poids. Nous nous sentons alors peu sûrs de nous, coupables et découragés.
Parce que les conflits sont épuisants, l'une des meilleures façons d'atteindre la liberté est de créer une paix intérieure. Pour vivre en harmonie et ne pas se laisser distraire par les tiraillements, il est important d'établir les conditions nécessaires à cet effet. C'est un pas important vers la libération.
Christophe André dit que nos sociétés acrasiogènes nous tiraillent entre nos faux espoirs et nos idéaux.
- Je suis capable d'identifier ce qui est le mieux pour moi.
- C'est à ma portée
- Je ne le fais pas.
C'est généralement parce que nous ne sommes pas doués pour cela, ou parce que nous ne sommes pas assez stricts avec nous-mêmes. Nous vivons dans une société qui rend difficile l'atteinte des bons objectifs avec les bons moyens. Ne laissons pas ces injonctions sociales faire obstacle à notre liberté !
Ne pas tomber dans le piège de la facilité
Christophe André affirme que si nous tombons dans les pièges de la voie facile, c'est peut-être parce que nous nous posons les mauvaises questions ou parce qu'il est difficile d'être humain. "Je crois que nous ne pouvons pas imaginer être une meilleure personne sans essayer. C'est complexe, c'est la nature humaine. Nous rêvons tous de faire des choses extraordinaires, mais nous nous heurtons tous à nos limites. Nos débordements émotionnels et notre subjectivité, notre faiblesse, notre paresse, nos préférences et notre subjectivité sont quelques-unes des raisons pour lesquelles nous ne parvenons pas à atteindre nos objectifs.
Pour Matthieu Ricard, l'égarement consiste à rechercher le bonheur quand il n'est pas là et à être dépendant des causes de la souffrance. Le discernement consiste à comprendre tous ces mécanismes et à s'efforcer de s'en libérer. Ce n'est pas une corvée, mais un enthousiasme joyeux de savoir qu'il y a une meilleure lumière au bout.
Les peurs peuvent être contrôlées
Alexandre Jollien considère la peur comme un écho du passé. C'est presque comme si la peur lui faisait retrouver l'enfant qu'il était autrefois. La peur ne peut être vaincue par la raison et la volonté.
"Certaines personnes sont plus sensibles au stress que d'autres.Ces prédispositions seront influencées par ce qui s'est passé dans l'enfance. Enfin, elles détermineront la façon dont nous les gérons à l'âge adulte. L'anxiété de vos parents ne signifie pas nécessairement que vous aurez un destin anxieux. L'épigénétique révèle que nos gènes peuvent influencer notre comportement jusqu'à un certain point. Christophe André explique que des efforts psychologiques peuvent faire la différence.
Faire un effort
Christophe Andre déplore le snobisme de l'absence d'effort. Il est beaucoup plus valorisant socialement de prétendre avoir réussi sans aucun effort. Nous vivons dans une société qui valorise davantage les travailleurs que les surdoués.
Discréditer l'effort est une attitude infantile. C'est la croyance que vous obtiendrez tout en un rien de temps. Il est possible de décomposer toute tâche difficile en tâches plus petites et plus faciles à gérer. Cela vaut aussi bien pour les arts et les études que pour des facultés telles que l'attention, la bienveillance ou l'équilibre émotionnel, ainsi que pour la liberté intérieure. L'essence de la persévérance est la joie par l'effort. Chaque pas est un élément de liberté, de joie. En effet, il vous apporte une sérénité intérieure qui vous encourage à continuer.
L'effort est nécessaire pour améliorer vos capacités mentales. La méditation, la pleine conscience sont autant de moyens d'augmenter ses capacités d'attention, de bienveillance et d'intelligence émotionnelle.
Le conseil de Matthieu Ricard est de simplement regarder autour de soi pendant 10 secondes chaque heure. On souhaite intérieurement, inconditionnellement, que toutes les personnes qui nous entourent soient heureuses, que leurs souffrances soient dissipées et leurs aspirations réalisées. "Il en restera quelque chose, comme un parfum à durée indéterminée, un parfum de bonté qui durera toute la journée.
Prier
Christophe Andre affirme que la prière est bonne pour la santé. Priez pour quelque chose en quoi vous croyez et cela sera bénéfique. La prière, surtout dans le monde d'aujourd'hui, me permet de laisser de côté toutes les distractions et l'action, pour me concentrer sur ma paix intérieure. C'est un moment de contemplation, de présence à soi-même et aux autres, et de reconnaissance qu'il y a peut-être quelque chose qui ne dépend pas de nous. C'est un acte d'humilité dans un monde plein d'orgueil.
L'esprit peut être entraîné à abandonner la croyance en la futilité de la souffrance. Alexandre Jollien observe que la prière nous relie à quelque chose de plus grand que notre individualité. Elle transcende la perte et le profit. Elle est totalement gratuite.